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REVUE DE PRESSE BD & CARICATURE ZEBRA N°137

par GéBé.
Expo GéBé
La bibliothèque nationale F. Mitterrand, qui a hérité des caricatures de GéBé (1929-2004), propose une rétrospective de l’œuvre d’un des piliers de « Charlie-Hebdo », canal historique, celui qui voulait tordre le cou à la culture bourgeoise.
On retient F. Cavanna parce qu’il a défini la ligne éditoriale originale de « Hara-Kiri » et poussé quelques jeunes caricaturistes inconnus à devenir mordants ; on retient le Pr Choron, parce qu’il a fait la fortune du titre en l’imposant contre l’Etat de droit républicain avec sa fameuse Une ; on retient moins GéBé, qui ne manquait pourtant pas de talent artistique… peut-être parce que son message était plus militant et moins humoristique ? Le discours militant marque une génération, parfois deux, rarement plus. La jeune génération est en droit de se demander, au XXIe siècle, à quoi cinquante ans de militantisme écologiste ont bien pu servir ?
Dernièrement Riss, rédac-chef de « Charlie-Hebdo », se demandait à quoi bon les discours des dix derniers papes en faveur de la paix des nations ? Et le pape François était, par dessus le marché, un fervent écologiste ! Si Riss était un peu plus audacieux, plus “célinien”, il pourrait se demander : à quoi bon l’ONU ?

Trois femmes et trois loups, par Eugène Grasset.
L’Esotérisme, une contre-culture ?
« Le Monde Diplomatique » (mai 2025) consacre un article à l’engouement des Français pour la littérature ésotérique. Son auteur, Timothée de Rauglaudre, y explique que le genre ésotérique a le vent en poupe et que les rayons « Esotérisme & spiritualité » des librairies font recette. Les ventes de livres ésotériques s’envolent, si bien que ce domaine, qui fut naguère une niche réservée à de petits éditeurs confidentiels, ne l’est plus.
Th. de Rauglaudre se perd en conjectures pour essayer d’expliquer à quoi cet engouement est dû, que le confinement sanitaire aurait amplifié, quoi qu’il préexiste.
En parlant d’ésotérisme, il ne faut pas oublier que Paris est l’un des hauts lieux de l’ésotérisme (après Rome, évidemment) ; les sectes diverses et variées y abondent, qu’elles soient typiquement françaises ou importées de l’étranger. La lecture des auteurs du XIXe siècle permet de s’en rendre compte : Balzac, Hugo, Flaubert, Huysmans… ont tous traité le thème, chacun à sa façon… et tous ne sont pas aussi ironique que Flaubert, ni aussi lucide sur le peu de clairvoyance de certains esprits soi-disant « rationalistes ».
Si l’on ajoute à l’ésotérisme, comme fait Th. de Rauglaudre, le “développement personnel” et le yoga, on fera bien de se demander plutôt ce qui n’entre pas dans le domaine de l’ésotérisme.
On ne doit pas sous-estimer le problème de la définition de l’ésotérisme. Th. de Rauglaudre ne voit pas que des pans entiers de la culture contemporaine relèvent aussi bien de l’ésotérisme : la psychanalyse est une science et une pratique ésotérique, en l’absence de preuves de son efficacité (la plupart des psychiatres la considèrent comme telle) - au demeurant Carl Jung ne s’en cache pas vraiment.
Certaines formes d’art contemporain sont parfois hermétiques, réservées à un public d’initiés. On peut d’ailleurs se demander dans quelle mesure l’occultisme n’est pas la raison d’être de cet d’art ?
L’accusation d’ésotérisme fut lancée par l’essayiste Simone Weil (1909-1943) (avec des arguments précis) à la physique quantique de Max Planck et certains de ses postulats théoriques abracadabrantesques. S. Weil a le mérite de rappeler ici un fait essentiel à la bonne compréhension de l’ésotérisme : celui-ci a toujours fait bon ménage avec la science.
Le rationalisme s’avère aussi pernicieux que la notion « d’Etat de droit » ; celle-ci revient à nier toutes les zones de non-droit (le vide juridique), zones qui correspondent à la carence et à l’impuissance de l’Etat, ou encore à sa corruption ; le rationalisme opère exactement de la même façon.
On ne peut examiner séparément la question du succès de l’ésotérisme de celle du développement de la culture de masse, produite en quantité industrielle. De même que le complotisme de la société américaine est une réaction aux mensonges d’Etat à répétition, dans une nation où ces mensonges sont perçus comme une violation de la transparence démocratique, on peut supposer que la vogue de l’ésotérisme est une réaction à la culture de masse industrielle, nihiliste et superficielle, conçue pour l’asservissement du peuple selon G. Orwell.

Affiche publicitaire par Jules Cheret.
Affiches à gogo
Sabine Gignoux conclut son article dans « La Croix » (18 avril) sur l’âge d’or de l’affiche artistique par le petit sermon de rigueur contre les « réseaux sociaux » et la « communication débridée ». Il y aurait donc une bonne culture de masse (le football, la bande-dessinée-qui-est-un-art, les défilés du 14-Juillet et… les affiches publicitaires), et une mauvaise culture de masse qui fait concurrence à la télévision et à la presse ?
Le Musée d’Orsay consacre une exposition aux affiches publicitaires qui, à la fin du XIXe siècle, tapissaient les colonnes Morris et les palissades, produites en grande quantité par de nouvelles presses motorisées ; leur racolage était d’autant plus efficace qu’elles étaient en couleurs et de plus grand format. L’affichisme fera la fortune de Cappiello, Mucha, Jules Cheret… mais des artistes moins légers tels Steinlein, Toulouse-Lautrec ou Gustave Jossot n’hésiteront pas à apposer leurs signatures sur des réclames. Il faut dire que le métier d’illustrateur ou de caricaturiste payait mal et que ces commandes complétaient les revenus de ces artistes. Cette concession au commerce n’est pas sans faire penser à celle des romanciers qui vendent au cinéma les droits d’adaptation de leurs romans, sachant qu’ils seront le plus souvent édulcorés, ou carrément trahis par des scénaristes peu scrupuleux.
L’affichisme est donc un art ambigu : il contribue à habituer le public à une composition et une perspective nouvelles, éloignées des procédés de la peinture à l’huile, en même temps qu’il est complètement creux, au niveau des slogans publicitaires.
S. Gignoux mentionne l’hostilité farouche de Baudelaire, le grand critique d’art de ce temps, qui note dans son Journal son « immense nausée des affiches ». Baudelaire associe la culture de masse, de façon prophétique, à la démocratie populiste, qui imposera au XXe siècle sa loi esthétique.
Le musée Toulouse-Lautrec d’Albi, de son côté, expose l’intégralité des affiches de Toulouse-Lautrec, récemment restaurées (jusqu’au 31 août).

par Pierre Samson.
Au Bonheur des Veuves
L’humoriste Pierre Samson ajoute sa pierre (tombale) à l’humour noir avec un album intitulé « Au Bonheur des Veuves » (éd. Chez Yvette, 2024).
On ne sait si le titre de cet album s'inspire (par antithèse) d'un des auteurs français les moins comiques... ou du désir effréné de Dalila de devenir veuve ?
Samson ne renouvelle pas le genre de l'humour noir, mais il le marie avec la nouvelle religion psychanalytique et son sacrement de confession alternatif.
La confrontation de l’humour noir et de la religion est une vieille histoire, qui remonte à l’enterrement d’Ophélie.
Quelques caricatures fraîches par Caumartin (“Facebook”), Rodriguez (“Facebook”), Piérick (“Fakir“), Jiho (“Marianne”) & Zombi (“Zébra”) :

par F. Caumartin.

par Rodriguez.

par Piérick.

par Jiho.

par Zombi.
Le fanzine Zébra du mois de mai est paru (écrire à [email protected] pour s’abonner).
