Le fanzine mensuel est paru !

2023, année jarryque !

L'année 2023 sera l'occasion de rendre hommage à Alfred Jarry (1873-1907), auteur du "Père Ubu" et de nombreux autres ouvrages moins mémorables ; Ubu est une satire de la tyrannie moderne, particulièrement brutale, bête et vulgaire, qui reste d'actualité.

Bien qu'il soit né à Laval, quelques Briochins (habitants de St-Brieuc) ont lancé un fanzine (gratuit) dédié au fondateur de la pataphysique, "La Gidouille briochine", dont le premier numéro (ci-dessus) est illustré avec des vignettes extraites de la BD dessinée par D. Cazanave (parue chez Casterman en 2018).

"Si les Briochins de l'époque avaient eu la tête sur les épaules et l'intelligence d'être raisonnables, ils auraient probablement modelé un Alfred Jarry logique, cohérent, rationnel, et, faisant un exercice d'uchronie, essayons d'imaginer quelle évolution aurait été la sienne, et celle de la culture, de l'intellect, de l'esprit.

(...) Je sais bien que je maximise à outrance l'importance de Jarry et de Saint-Brieuc dans l'évolution du Monde, mais peut-être mon déraisonnement provoquera-t-il des questionnements, ou alors, au moins, amusera-t-il la galerie." écrit Patrice Verdure, coordonnateur de l'année jarryque.

Les Briochins revendiquent Jarry car Alfred vécut à St-Brieuc dix ans, de 5 à 15 ans, effectuant sa scolarité au principal collège public de la ville ; il poursuivit cette scolarité à Rennes, où fut inventé le personnage du Père Ubu par Alfred et ses camarades, inspirés par leur professeur de science (la science ne joue-t-elle pas un rôle majeur, pour ne pas dire cataclysmique, dans la bêtise moderne ?). Le périple scolaire de Jarry s'achèvera à Paris, qui lui fut fatal car il mourut prématurément à l'âge de 34 ans.

En plus de "La Gidouille briochine", composée principalement de petites compositions originales dans l'esprit d'A. Jarry, plusieurs événements sont prévus dans le courant de l'année, dont le programme est aussi disponible sur le site internet du fanzine.

Député super-héros

Aux Etats-Unis, les parlementaires prêtent traditionnellement serment sur la Bible avant d'entrer en fonction ; depuis quelques années cette coutume admet le Coran et divers livres sacrés de religions comptant des adeptes aux Etats-Unis, comme le bouddhisme. Les députés ("congressmen/women") athées, quant à eux, sont autorisés à prêter serment directement sur la Constitution.

Le député "latino" (démocrate) Robert Garcia, fraîchement élu au Congrès des Etats-Unis en Californie, a fait preuve d'originalité en réclamant d'effectuer sa prestation de serment sur un album de "Superman" (de la bibliothèque du Congrès), la photo de ses parents récemment morts du coronavirus, et sa fiche de naturalisation.

Au coeur des ténèbres

« Full-stop, le génocide des Tutsis du Rwanda » : il ne s’agit pas ici d’une BD ordinaire, mais plutôt d’un contraste ; le contraste entre la paix retrouvée au Rwanda, petit pays d'Afrique de l'Est densément peuplé, peint ici par Emmanuel Prost en rouge, vert et bleu, complètement cabossé par ses « mille collines » boisées d’où lui vient son surnom, et d'autre part l’effort de quelques personnes, à commencer par le collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR) d’Alain et Dafroza Gauthier, pour que le massacre des Tutsis par les Hutus ne tombe pas dans l’oubli (environ un million de Tutsis ont été torturés et massacrés dans un pays en comptant 12 millions).

Cet effort passait par la condamnation en 2018 des maires de la commune de Kabarondo, Octavien Ngenzi et Tito Barahira, pour génocide et crime contre l’humanité (rejoignant ainsi une poignée de condamnés). Ces deux meneurs ont nié jusqu'au bout leur participation, malgré des témoignages accablants de survivants. Bien au-delà des mensonges des meneurs et des responsables directs, Frédéric Debomy relate l’isolement de ceux qui ont tenté de reconstituer les faits avec un maximum de précision pour élucider ce crime politique, qui vient s’ajouter à la liste déjà longue et effroyable des crimes politiques du XXe siècle.

La cause israélienne s’est emparée du génocide des Juifs ; ou bien encore la cause arménienne, ukrainienne (Olodomor) : dans le cas du génocide au Rwanda (1994), aucun parti n’appuie les enquêteurs. Ils ont été accusés d’être à la solde du chef rebelle Tutsi Paul Kagamé, actuel chef de l'Etat rwandais ; mais celui-ci semble plutôt avoir fait le choix de jeter le manteau de Noé.

Depuis la publication de cet album en 2019, le rapport Duclert sur le rôle de la France dans le génocide contre les Tutsis en 2021 a conclu à « une responsabilité lourde et accablante » de la politique menée par l’Elysée (la France ayant pris le relais de la Belgique comme puissance néo-coloniale).

On dispose par ailleurs du témoignage du commandant de la force d’intervention armée de l’ONU, présente sur place au moment des massacres, le général canadien Roméo Dallaire ; or ce témoignage pointe nettement la responsabilité de l’ONU.

Le Rwanda reste aujourd'hui sous la tutelle, plus discrète qu'avant mais néanmoins bien réelle, de puissances étrangères, ce qui rend le travail des historiens plus difficile.

(Full-stop, le génocide des Tutsis du Rwanda, par Frédéric Debomy et Emmanuel Prost, éd. Cambourakis, 2019.)

L'Ere du soupçon

Il ne se passe pratiquement pas un trimestre depuis la première campagne électorale d'E. Macron sans que l'argument de la lutte contre l'antisémisme ne soit utilisé par les médias pour défendre le candidat Macron, puis le président-candidat Macron ; et Dieu sait que ces médias sont nombreux !

Le dernier en date à avoir été "soupçonné" est le caricaturiste tOad, pour le dessin ci-dessus publié en ligne (pour Regards.fr), qu'il a préféré effacer ; avant lui, ce sont les Gilets jaunes (Lekto), "Siné-Mensuel", ou encore l'équipe de campagne de F. Fillon qui ont été visés par ce type d'accusation, "cousue de fil blanc", qui vise à intimider les rares médias indépendants et non à lutter contre l'antisémitisme.

Quelques caricatures par Jean Mazurie, Deligne, Foolz, Zombi.

Caricature par Foolz dans "Charlie-Hebdo", extraite d'une double-page sur le choc des générations.