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REVUE DE PRESSE BD & CARICATURE ZEBRA N°89
7 Mai 2023
Une du Spectator par Morten Morland.
Pitié pour le roi ?
Il est loin le temps où se payer la tête du roi d’Angleterre pouvait vous coûter la vôtre ; dorénavant le roi est la cible des caricaturistes les moins téméraires. Et le jour du couronnement, encore ! « The Spectator » propose ainsi à ses lecteurs un numéro “spécial couronnement” (Une par Morten Morland, désigné meilleur caricaturiste du royaume en 2022).
La famille royale britannique est une sorte de paratonnerre : elle permet de détourner l’attention des lascars qui sont à la barre, tandis qu’Emmanuel Macron, lui, doit être au four et au moulin : jouer au père de la nation laïque d’un côté, tandis qu’il surveille ses ministres d’un autre oeil. C’est usant.
La France est donc une monarchie, mais avec les inconvénients d’une démocratie. Et dire que, si Napoléon III n’avait pas disjoncté comme V. Poutine, les Français pourraient se presser sur les Champs-Elysées pour assister au couronnement de Napoléon VIII ou IX ; il n’y en aurait pas que pour le fooball.
“Le Grand Masturbateur” par Salvador Dali
Sens giratoire de l’Histoire
Les non fungible tokens (NFT) sont à l’art du XXe siècle ce que le bitcoin est à la monnaie conventionnelle. Par conséquent le musée d’art moderne Pompidou, qui vient d’acquérir quelques-uns de ces jetons non-fongibles, histoire de rester dans le coup, n’est pas à l’abri d’une sévère décote ; mais, après tout, le sens profond d’une performance artistique n’est-il pas de jeter l’argent par les fenêtres ? Le personnage d’Antonio dans le « Marchand de Venise » serait dans ce cas le premier performer répertorié.
L’intérêt -le seul-, des NFT, est de poser nettement l’équation entre l’argent et l’art ; nettement, c’est-à-dire sans les grimaces et les jeux de mots facétieux d’un Salvador Dali, qui permettaient à ce grand gourou de donner le change.
L’art de Dali est-il de l’art ? Et les totems africains ? Tandis que Picasso a su en recycler les formes, Dali a su en recycler l’esprit, transformant le sens de l’Histoire de l’art en sens giratoire de l’Histoire.
par Cabu.
L’Officiel de Cabu
Ça y est, depuis le mois d’avril, Cabu a son site officiel.
On y trouve peu de dessins mais une bibliographie officielle, et les dates des expos en cours ou en préparation.
Officiellement, Cabu était « contre toutes les guerres ». On ne saura donc jamais s’il aurait fait une exception, comme 99% de ses confrères détenteurs d’un matricule de journaliste, pour l’offensive du printemps 2023 (bientôt sur vos écrans) ?
A l’inverse Cabu ne saura jamais qu’on lui a décerné la légion d’honneur après sa mort.
caricature par Zombi.
RIP Ph. Sollers (1936-2023)
L’homme de lettres et de télévision Philippe Sollers a cassé sa pipe ce week-end de printemps. Il était invité régulièrement à la télévision pour y prêcher la bonne littérature. On le surnommait “le chanoine des lettres”, en référence à son humeur libertine et au pape BHL, dont il était, en quelque sorte, le coadjuteur.
Case extraite d’”Autant en emporte le vent”, adapté par Pierre Alary.
Autant en emporte la censure
L’adaptation en BD d’”Autant en emporte le vent“, célèbre roman de Margaret Mitchell, prix Pulitzer 1937, plaçait Pierre Alary devant une triple gageure.
Première gageure : celle de la fidélité au roman. Beaucoup de scénaristes se contentent en effet de kidnapper une oeuvre dans le domaine public, puis de la triturer dans tous les sens, avant d’apposer le nom de l’auteur de l’œuvre originale sur la couverture, puis de proposer, avec la complicité d’un “éditeur” (le terme de margoulin est plus approprié), une sorte de produit éditorial innommable — un bourbon vendu pour un single malt.
Secundo, l’adaptateur a dû affronter le “politiquement correct”, qui relègue actuellement “Autant en emporte le vent” dans l’Enfer.
Puisqu’elle vaut toujours, utilisons la défense de Molière contre ses détracteurs puritains : - “Autant en emporte le vent” ne dit pas ce que la censure dit qu’il dit ; ce n’est pas un roman “sudiste'“, un roman cultivant la nostalgie des plantations de coton où les noirs s’échinaient pour le compte de riches exploitants.
Ce n’est pas non plus, d’ailleurs, un roman sentimental (c’est assez rare de la part d’une auteure pour le souligner). La censure s’acharne sur M. Mitchell parce qu’elle n’a pas écrit un roman engagé, mais un roman réaliste, qui contredit le roman national américain.
La troisième difficulté réside dans la concurrence d’une adaptation cinématographique (1939) par Victor Fleming (m. en scène) et Sydney Howard (scénario), si célèbre qu’elle éclipse largement le roman. Si le film ne trahit pas le cynisme de M. Mitchell (dans une culture où le cynisme est assimilé au péché), il a l’inconvénient de se focaliser sur l’intrigue sentimentale et de reléguer au second plan la guerre civile de Sécession (1861-1865), tenue par certains historiens pour la première guerre “industrielle”.
On ne peut juger de l’effort de P. Alary (éd. Rue de Sèvres) pour servir intelligemment l’œuvre originale, dans la mesure où seul un volume (145 p). est paru, sur les deux prévus. Cependant, malgré un dessin trop “américain”, c’est-à-dire trop académique, on peut dire à la lecture du premier tome que P. Alary n’a pas transformé “Gone with the Wind” en guimauve sentimentale façon “Titanic”.
Quelques caricatures fraîches, par Alex (“Le Courrier Picard”), Tony Husband (“Private Eye”) et Zombi (“Zébra”)
caricature signée Alex.
par Tony Husband.
Caricature par Zombi pour le fanzine Zébra.
Une de Zébra (mai 2023)